Techniques de gravure, la taille douce

Au sens absolu du mot, la gravure est l’art de tracer par incision, à la surface d’une matière quelconque, des caractères, des ornements ou des figures. C’est ainsi que l’homme des cavernes nous a transmis sur l’os et la pierre la silhouette des animaux de l’époque quaternaire ; c’est par la gravure que les artistes de l’antiquité et du Moyen-Age obtenaient les cylindres, les intailles, les sceaux, les plaques tombales, les émaux champlevés, les matrices à gaufrer le cuir ou le velours, et aussi les planches destinées à l’impression des étoffes décorées.

Le burin

Burins de graveurs
Burins de graveurs

Le graveur se sert d’une planche de métal, généralement du cuivre, de faible épaisseur, parfaitement polie, et d’un instrument, le burin, solide tige d’acier de section carrée ou losangée, bisautée, emmanchée à une petite poire de buis. Il attaque la planche en formant un angle variable, et tout en creusant, soulève un copeau: les sillons seront bordés de petites barbes de métal qui seront supprimées avec un ébarboir. C’est le dessin lui même qui sera gravé: chaque sillon équivalent à chaque trait du dessin.

L’eau-forte

Gravure à l'eau-forte
Gravure à l’eau-forte

Dans les techniques classiques de l’eau-forte, ce n’est plus la main qui gravera par l’intermédiaire d’un outil, mais l’acide. La plaque est recouverte d’un vernis, le graveur dessine sur ce vernis avec une pointe, faisant apparaître le métal où la pointe court sur le vernis. Ainsi dénudée de son vernis, la planche est plongée dans un bain d’acide dilué. Cet acide mort les partie non protégées du vernis, et creuse ainsi la plaque de métal, comme le faisait le burin. La morsure, c’est-à-dire le creux, jugée suffisante, la plaque est rincée, dévernie et prêtre au tirage.

L’aquatinte

Plaques de cuivre pour aquatinte
Plaques de cuivre pour aquatinte

C’est le même processus que l’eau-forte, avant de plonger la planche dans l’acide, on recouvre certaines surface de poussière ou de grains de résine. La planche est chauffée, et la résine adhère solidement au métal. C’est en quelque sorte un vernis, mais un vernis troué d’une multitude d’espaces. L’acide mord aux endroits où il n’y a pas de points de résine, et creuse tout un ensemble de petits trous. Par morsures successives le graveur peut donner optiquement une teinte régulière. L’aquatinte permet d’obtenir des valeurs de gris léger à noir foncé suivant le temps de morsure, la densité de résine déposée, la grosseur du grain, et les répétitions de grainage.

La pointe sèche

Gravure à la pointe sèche
Gravure à la pointe sèche

La point-sèche est la manière la plus simple de graver sur le métal, mais pas nécessairement la plus facile. Il suffit d’une plaque polie et d’une pointe. Le graveur dessine sur cette plaque en rayant la surface. Avec plus ou moins de vigueur, le métal sera plus ou moins arraché, donc aussi creusé, mais chaque trait sera entouré de barbes en plusieurs épaisseurs. Cette dernière caractéristique donnant aux pointes-sèches un aspect très particulier d’enveloppement de la ligne. La différence essentielle avec, par exemple, le burin, est que ce qu’il y a en surface est au moins aussi important que le creux . L’encre, au tirage, accrochant les barbes, le résultat sera noir velouté et profond, très caractéristique.

La manière noire

Berceaux pour manière noire
Berceaux pour manière noire

C’est le premier procédé d’impression qui permit d’obtenir des niveaux de gris sans recourir aux hachures ou aux pointillés. La manière noire permet une grande variété de teintes et son charme réside dans le fait que les formes « paraissent sortir de l’ombre. Le premier travail consiste à grainer la plaque uniformément de petits trous, à l’aide d’un outil appelé « berceau ». Un mouvement de balancement du manche, d’abord d’avant en arrière puis de gauche à droite entame le métal de façon régulière et uniforme. Le grain doit être extrêmement régulier afin de retenir l’encre lors de l’impression et permettra ainsi d’obtenir un noir profond. On parle d’un « tour » lorsqu’on a effectué un premier passage sur la surface de la plaque. Les graveurs des XVIIe et XVIIIe siècles préconisaient vingt tours afin que la plaque soit correctement grainée. Puis, en grattant les grains avec un grattoir et en polissant les pointes rugueuses de la surface avec un brunissoir, le graveur éclaircit progressivement les zones du dessin qui retiendront plus ou moins d’encre et donneront les blancs et les tonalités de gris.